La rétention du personnel est le grand enjeu des employeurs actuellement. Comment faire en sorte que vos employés et employées aiment travailler pour vous? Voici des pratiques qui peuvent faire une différence.
En 2021, le mot-clé pour tout bon gestionnaire devrait être bienveillance, lance d’emblée Marie-Claude Dauray, directrice générale de PME MTL Grand Sud-Ouest.
« Les personnes employées recherchent un environnement de travail sain qui offre de la flexibilité et veulent conserver les acquis du télétravail, dit-elle. Ils et elles vivent encore plus ou moins d’anxiété à cause de l’incertitude causée par la pandémie et de la fatigue s’est accumulée chez certains d’entre eux.
C’est donc important de les sonder régulièrement sur ce qui va bien et aussi moins bien. Mais ce n’est pas tout de demander leur avis, il faut aussi les écouter et apporter des ajustements au besoin. »
Une culture d’entreprise forte qui se traduit par des actions concrètes au quotidien est aussi importante.
« Les jeunes générations ne travaillent pas que pour le salaire, explique Patrick Deraspe-Dion, Commissaire industriel et ressources humaines à PME MTL Grand Sud-Ouest. Ils et elles sont attirés par des entreprises qui rejoignent leurs valeurs, qui changent les choses.
Les employeurs qui ont du succès dans la rétention sont ceux qui mettent beaucoup d’effort à faire vivre la culture organisationnelle. Ils donnent un sens au travail. »
Des valeurs fortes
Michael Domingue, copropriétaire du Groupe Cheers ne saurait mieux dire. Il est rare que son entreprise voie partir de son personnel. Elle œuvre pourtant dans un domaine où les enjeux de main-d’œuvre sont criants : la restauration et les bars. Quel est donc son secret?
Le Groupe Cheers, qui emploie 185 personnes au plus fort de l’été, met de l’avant des valeurs d’entreprise qui séduisent les jeunes générations, fortement représentées au sein de son personnel.
« Par exemple, on privilégie un circuit de distribution court pour les produits alimentaires, explique Michael Domingue. On est très proche des producteurs avec qui on fait affaire. Un élément qui plait aux jeunes chefs et cheffes qui nous choisissent pour cette raison. »
Exprimer les valeurs de l’entreprise, c’est une chose, les incarner en est une autre. Les talents ne seront pas dupes si les bottines ne suivent pas les babines.
« Créer notre propre chaîne de distribution exige du temps et de l’argent. Il faut aller à la rencontre des producteurs et développer une relation d’affaires équitable. Cela représente des efforts qui sont toutefois payants au bout du compte », explique Michael Domingue, qui est fier d’avoir vu revenir la majorité de son personnel à la réouverture des bars et restaurants.
Avantages sociaux et possibilités d’avancement
Mais ce n’est pas tout : les occasions d’emplois sont nombreuses et variées au sein du Groupe Cheers, qui comprend plusieurs restaurants, des épiceries ton-quartier (des marchés de produits locaux) ainsi qu’une centrale de production qui dessert les établissements du groupe.
« C’est une autre de nos forces : on offre de nombreuses possibilités d’avancement, affirme Michael Domingue. Les personnes employées peuvent grandir avec nous. »
Postes à temps plein — ce qui est rare en restauration —, salaires supérieurs à la moyenne, avantages sociaux sont d’autres facteurs qui contribuent à offrir des conditions de travail attractives.
« Dans un marché compétitif, le salaire est un incitatif important, mais il faut aussi créer une cohésion au sein de l’équipe, rappelle Patrick Deraspe-Dion. En télétravail, tout le monde s’ennuie des conversations autour de la machine à café. Il faut instaurer des moments où le personnel peut se regrouper dans un autre contexte que le travail, que ce soit lors de 5@7 ou d’une activité sportive pour socialiser. »
« Il faut aussi garder à l’esprit qu’il est plus difficile pour un employé ou une employée de quitter son équipe que son employeur, abonde Marie-Claude Dauray. D’où l’intérêt d’entretenir la cohésion de groupe. »
Tester de nouvelles recettes
Favoriser la rétention, c’est aussi savoir poser des gestes innovants pour son personnel. Malgré les difficultés de recrutement actuelles, Anie Rouleau, présidente fondatrice de The Unscented Company, ne s’empêche pas d’aller de l’avant pour leur offrir un cadre de travail agréable et stimulant.
La dirigeante envisage par exemple la mise à l’essai de la semaine de quatre jours. Actuellement, un seul employé profite de cet horaire qui pourrait être étendu à toute l’équipe. Elle examine également la possibilité de mettre en place un programme de référencement pour encourager le personnel à recommander des candidatures.
« Il faut essayer des choses pour trouver la recette qui fonctionne. Il y a toutefois des compromis que je ne suis pas prête à faire comme créer un déséquilibre dans l’échelle salariale », explique Anie Rouleau, qui a dû se résoudre à accepter la démission de deux employés ayant trouvé un emploi mieux payé pour quelques dollars l’heure de plus. Cela démontre à quel point le marché de l’emploi est tendu.
« Pour recruter, les entreprises devraient peut-être s’inspirer du modèle de repêchage dans la Ligue nationale de hockey, suggère Patrick Deraspe-Dion. Les équipes recrutent de jeunes talents en vue de construire pour l’avenir. Développer sa main-d’œuvre, c’est aussi une bonne façon de la fidéliser. »
5 conseils pratico-pratiques
Par Marie-Claude Dauray, directrice générale de PME MTL Grand Sud-Ouest
« Je n’ai pas toutes les réponses à tous les enjeux et la gestion n’est pas une science exacte. Je partage simplement ici quelques idées que je pense gagnantes et faciles à mettre en œuvre :
1. Miser sur un leadership communicationnel
La nouvelle génération a besoin qu’on lui explique les choses, veut comprendre et être près de son gestionnaire. Ces employés et employées veulent aussi des processus, ils et elles sont très exigeants.
Ils doivent avoir les bons outils de travail, de la flexibilité, de la valorisation, de l’autonomie, car ils veulent s’épanouir et gravir les échelons. Ils veulent faire partie de la solution.
2. Se renseigner sur ce nouveau monde du travail
Car tout est en train de changer! L’organisation d’avant la pandémie n’existe plus, il faut la repenser. Le personnel ne veut pas perdre les acquis du télétravail par exemple, surtout la flexibilité qu’il leur offre.
Beaucoup d’employeurs ont décidé de travailler sur une politique de travail dans un mode hybride, donc en télétravail et en présentiel, en donnant aussi envie au personnel de venir au travail pour favoriser la collaboration et conserver une culture d’entreprise.
Il faut absolument que les gestionnaires évoluent sur la gestion du travail et qu’ils ne reviennent pas sur leurs méthodes d’avant la COVID-19.
3. Demander au personnel leur avis
Il faut consulter et écouter ses employés et employées. Cela peut passer par la mise en place de comités consultatifs ou l’organisation de sondages, par exemple.
Pour toute la question du télétravail notamment, on peut leur proposer un sondage afin de mesurer le degré de confort à la maison et le niveau de bonheur. Il faut absolument ne pas laisser le personnel dans le flou, il faut répondre à leurs questions et leur montrer qu’on a envie de les écouter.
4. Ne pas trop s’en mettre sur les épaules
Des gens vont partir, pour plein de raisons, et il faut l’accepter humblement. Faire de son mieux, écouter, sentir et accepter qu’on n’est pas parfait et que ceux qui partent le font pour de bonnes raisons. Il faut juste en être conscient. Les meilleurs leaders perdent aussi des gens en ce moment.
5. Leader avec le cœur
Les personnes travailleuses s’attendent à un leadership de cœur en ce moment. J’ai pu observer des signes de détresse pendant la pandémie et il faut absolument être empathique et essayer de comprendre la situation de chacun.
Pour les parents par exemple, notamment ceux avec de jeunes enfants, ça été une période très difficile, car il a fallu gérer beaucoup de choses en même temps. Chaque employé et employée a besoin d’un environnement sain et stimulant, mais qui est flexible face aux réalités qu’il vit en ce moment. »