Économie sociale : des entreprises essentielles pour l’après-pandémie

Parole d’expert | 14 mai 2020

Les entreprises d’économie sociale démontrent leur pertinence depuis le début de l’actuelle crise. Et elles seront encore plus nécessaires au moment de la relance, croit Nadra Wagdy, directrice, services-conseils et financement en économie sociale à PME MTL Centre-Est. La spécialiste parle ici du rôle qu’elles jouent actuellement et de l’importance qu’elles prendront pour la suite.

Un grand nombre d’entreprises d’économie sociale se démarquent depuis le début de la pandémie. Ce n’est pas vraiment étonnant puisque ces organisations existent d’abord pour répondre aux besoins sociaux, économiques et environnementaux de leurs membres, et offrent surtout des services de proximité et essentiels. À l’heure où la sécurité alimentaire et les soins aux personnes, entre autres, constituent des préoccupations majeures, on mesure donc collectivement l’importance de tels entrepreneurs.

Les entreprises d’économie sociale sont capables de faire preuve de résilience en temps de crise.

Ce constat réjouit Nadra Wagdy, qui se sert de la réalité des dernières semaines pour tracer un parallèle avec l’avenir. « Depuis mars, on assiste à une grande mobilisation citoyenne et à un vaste effort collectif, rappelle-t-elle. Or, il ne faut pas penser que les enjeux actuels vont disparaître après la pandémie, bien au contraire. Les multiples besoins des communautés seront présents à moyen terme. »

Agilité d’affaires en temps de crise

Pour la spécialiste, ces entreprises ont fait preuve d’agilité et de souplesse depuis la fin de l’hiver : « Que ce soit en transformant un processus de production ou en ajoutant un volet sanitaire, alimentaire ou autre à leurs services habituels, elles ont apporté une solide contribution et des solutions efficaces avec des produits et des services directement liés à la crise. »

À ce titre, Nadra Wagdy cite Bouffe-Action de Rosemont et La Cantine pour tous, qui mutualisent une flotte de 9 camions réfrigérés afin de soutenir les organismes œuvrant en sécurité alimentaire. De son côté, La Cantine pour tous met son réseau à la disposition de groupes variés qui produisent et distribuent 1500 repas chauds par jour aux personnes sans abri. Dans un autre registre, l’imprimerie Imprime Emploi a déployé ses ressources et son équipement pour produire de la signalétique personnalisée et adaptée dans le contexte actuel de distanciation sociale. Pour sa part, Coop Couturières Pop a mobilisé une armée de couturières autour de la confection de masques pour ceux qui assurent des services essentiels.

« Ces projets collectifs sont issus d’une collaboration entre plusieurs acteurs, explique l’experte. Les entreprises d’économie sociale sont très ancrées dans leur communauté. Elles disposent d’un grand réseau d’entraide, et leur mobilisation est très rapide. De plus, les surplus générés par leurs activités sont en grande partie réinvestis dans le projet collectif ou distribués aux membres de manière équitable, ce qui contribue à leur résilience économique en temps de crise. Enfin, elles reposent sur des modèles de gouvernance démocratique, où l’économie est mise au service de l’humain. »

Des modèles pour aujourd’hui et demain

Au-delà des circonstances et de la pandémie, Nadra Wagdy est ravie de l’émergence de modèles d’affaires collectifs qui servent plus que les besoins ponctuels et immédiats. « L’économie sociale apporte une vision humaniste de la transition écologique. Elle permet aux citoyens de se réapproprier les grands enjeux contemporains », dit-elle. Par exemple, la coopérative de solidarité Celsius vise à déployer une infrastructure de géothermie collective dans trois ruelles de Rosemont. On y exploitera la température du sous-sol terrestre, qui est relativement constante, afin de chauffer ou rafraîchir 50 logements. Ainsi, l’on créera une alternative au gaz et au mazout, contribuera à limiter les émissions de gaz à effet de serre, aidera à verdir les ruelles et renforcera le tissu social.

En informatique, Insertech a récupéré, depuis 1998, plus de 190 000 ordinateurs, puis les a remis à neuf avant de les vendre à des prix abordables. C’est autant d’appareils qui n’ont pas fini au dépotoir et qui, en plus, ont servi des milliers d’utilisateurs.

L’occasion sera belle pour repenser notre rapport à la consommation, à la production et au transport, et donc redonner sens à l’économie.

Dans le secteur de la restauration, La Vague a implanté en août 2018 La Tasse, un système de dépôt de contenants réutilisables de boissons à emporter qui vise à réduire la quantité de contenants à usage unique. Enfin, la coopérative La Remise consiste en une vaste banque de plus de 1 000 outils qu’on rend accessibles à la location pour sept jours. Là aussi, l’économie du partage, la réduction de l’empreinte écologique et l’esprit communautaire reposent au cœur du concept.

Repenser l’économie

Au-delà des bonnes actions sous-jacentes à de telles initiatives, Nadra Wagdy estime que dans le contexte d’incertitude qui marquera la période post-Covid, les principes de l’économie sociale seront des composantes maîtresses d’une relance économique inclusive et durable. « L’occasion sera belle pour repenser notre rapport à la consommation, à la production et au transport, et donc redonner sens à l’économie. »

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Cet article a été écrit en collaboration avec Nadra Wagdy, directrice, services-conseils et financement en économie sociale, de PME MTL Centre-Est.

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