Les obligations communautaires suscitent de plus en plus d’intérêt à Montréal. En permettant aux OBNL de réaliser des projets structurants tout en renforçant leurs liens avec leur communauté, elles sont une force de l’économie sociale. Mais attention : comme tout titre obligataire, elles constituent une dette pour l’organisation émettrice. Celle-ci doit donc en être bien consciente et avoir un plan sérieux de remboursement avant de recourir à un tel outil. Deux expertes font le point sur la question.
Qu’est-ce qu’une obligation communautaire?
L'obligation communautaire est un titre de créance non garanti, donc un prêt d’argent par la communauté à l’organisme émetteur des obligations. Elles ont ainsi une valeur nominale, une échéance et une rémunération (taux d’intérêt, généralement peu élevé) pour le créancier. De plus, elles ne peuvent être émises que par des OBNL, sans intermédiaire ni prospectus.
« C’est un outil tout indiqué pour les organismes qui doivent consolider leur développement, explique une directrice, services-conseils et financement en économie sociale à PME MTL Centre-Est. Que ce soit pour acquérir un terrain, une bâtisse ou encore pour renouveler des équipements, ce financement permet à l’organisme de grandir et de faire grandir la communauté où elle est ancrée. »
L’importance des investisseur(e)s solidaires et d’un projet attrayant
Encore faut-il que cet ancrage soit solide. Pour Anyle Côté, directrice du Conseil d’économie sociale de l’île de Montréal (CESIM), c’est le premier point à considérer : « Si le profil des investisseur(e)s peut varier (personnes, OBNL ou coopératives, entreprises privées, fondations ou institutions), on vise d’abord les personnes sympathisantes de l’organisme (partenaires, personnes utilisatrices, membres ou clientèle) et les citoyen(ne)s qui veulent investir dans leur communauté. »
Mais est-ce que ces personnes constituent un bassin suffisant et diversifié d’investisseurs et d'investisseuses potentielles? C’est la première question qu’un OBNL qui souhaite émettre des obligations doit se poser.
Il faut aussi, bien sûr, que le projet à financer soit attrayant, puisque de tels créanciers et créancières souhaitent plus qu’un rendement sur leur investissement.
« La réussite de l’émission d’obligations communautaires par des organismes comme le Cinéma du Parc ou le Bâtiment 7 démontre que leurs investisseur(e)s et leur communauté de soutien voulaient contribuer à une entreprise à laquelle ils et elles croyaient, en phase avec leurs valeurs profondes et qui ferait une différence sur le plan local », souligne Anyle Côté.
Ces entreprises ont ainsi pu faire la preuve de leur ancrage dans leur communauté de soutien. En conséquence, leur réussite avec les obligations communautaires leur a donné un effet de levier auprès des bailleurs de fonds traditionnels.
Les conditions de réussite
Si la communauté de soutien est solide et solidaire et si le projet à financer est attrayant, d’autres points sont à évaluer : la solidité de l’organisme, son rayonnement et ses perspectives de développement doivent être bien établis. Il faudra aussi s’assurer de l’engagement de partenaires importants.
« Comme tout émetteur d’obligations, l’OBNL doit avoir un plan d’affaires solide ainsi qu’une capacité démontrée à emprunter et à rembourser à terme ses créanciers », indique l'experte en économie sociale à PME MTL Centre-Est.
Elle soulève également d’autres réflexions à considérer, parfois sous-estimées, mais essentielles : « Peut-on compter sur d’autres sources de financement? Le conseil d’administration est-il prêt à s’impliquer ? L’organisme est-il prêt à assumer une charge administrative qui peut être importante? »
L’équipe administrative doit être capable de bien faire comprendre les enjeux et risques aux membres de la communauté d'investissement, puis de vendre les obligations et de les gérer.
Au sujet des communications et relations avec les investisseurs et investisseuses, Anyle Côté insiste : « Elles doivent être régulières et transparentes. C’est à l’organisation émettrice de déterminer les meilleurs moyens de rester en lien avec sa communauté de soutien, même après l’émission des obligations. Ces communications peuvent prendre plusieurs formes : courriels, envoi du rapport annuel, invitation à un lancement ou un cocktail, etc. »
Le cycle des obligations communautaires
On ne s’improvise donc pas émetteur d’obligations communautaires, d’autant plus qu’il faudra s’en préoccuper sur une longue période qui comprend plusieurs étapes :
- Appropriation par les dirigeant(e)s de l’organisme des modalités de cet outil financier;
- Conception de la trousse d’investisseur(e);
- Émission, vente et gestion des obligations;
- Remboursement avec intérêts aux créancier(ère)s;
- Analyse des résultats à l’échéance (bilan);
- Lancement d’une nouvelle série d’obligations, s’il y a lieu.
Des services pour aider les OBNL intéressés par cet outil financier
PME MTL peut contribuer à des campagnes d’émissions d’obligations communautaires, grâce à son Fonds de souscription d’obligations communautaires. Le Fonds permet de soutenir des entreprises collectives établies sur l’île de Montréal en leur offrant d’acheter des obligations communautaires pour un montant égal ou inférieur au montant total souscrit par les citoyen(ne)s-investisseur(e)s.
Les entreprises d’économie sociale peuvent également se prévaloir gratuitement du soutien de Télescope pour faire en sorte que leur campagne porte fruit.
Pour obtenir plus d’informations sur une campagne d’émission d’obligations communautaires et pour connaître la marche à suivre, contactez votre pôle de service de PME MTL.
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Cet article a été rédigé en collaboration avec une directrice, services-conseils et financement en économie sociale à PME MTL Centre-Est et Anyle Côté, directrice du CESIM.