À 37 ans, Kristel Miville est à la tête de Multiforme Métal, une entreprise, dont elle a pris la relève il y a quelques mois avec son associé. Les débuts sont un succès après un processus d’acquisition exigeant.
Comptable dans des entreprises manufacturières depuis plusieurs années, Kristel Miville avait envie d’entreprendre. Mais pas de partir de zéro. Avec son associé, Jonathan Gobeil, anciennement directeur des opérations chez Bombardier, elle a racheté une entreprise : Multiforme Métal, à Rivière-des-Prairies, qui conçoit et installe des chutes à déchets dans les condos depuis 1986.
Six mois après l’accession de Kristel Miville à la présidence et Jonathan Gobeil à la direction générale de l’entreprise, le nombre d’employés est déjà passé de 13 à 21 et devrait encore augmenter d’ici la fin de l’année. Le chiffre d’affaires est lui aussi en hausse et devrait être supérieur de 15 à 18 % à celui de l’année dernière. Quant à l’usine, sa superficie a été agrandie de 60 %.
Les clés de la réussite résident en plusieurs facteurs.
Choisir la bonne entreprise à acquérir
Premier défi : « Personne n’affiche que son entreprise est à vendre. Pour connaître celles qui le sont, il faut d’abord faire savoir qu’on chercher à acquérir une compagnie puis, tout se fait par le bouche-à-oreille », explique l’entrepreneure, qui a passé en revue une quarantaine de firmes en vente avant de trouver Multiforme Métal. Ensuite, il faut analyser la candidate selon ses propres critères.
Un des enjeux de l’industrie était de s’adapter aux changements et aux nouvelles technologies
Kristel Miville et son associé voulaient une société dans le secteur manufacturier, qu’elle présente un potentiel de croissance et des finances saines, qu’elle soit ni trop grande ni trop petite et que son prix cadre avec le budget qu’ils s’étaient fixé, une mise de fonds de 20 % étant généralement exigé.
Enfin, ils ont trouvé l’essentiel : « le clic avec les vendeurs », précise Kristel Miville. « Les propriétaires ne voulaient pas laisser leur entreprise à n’importe qui, quel que soit le prix. Il fallait qu’il y ait « un fit émotionnel » avec les acquéreurs », poursuit-elle. Cela facilite aussi les discussions.
Suivre un processus d’acquisition long et exigeant
Une fois la perle rare trouvée, les discussions avec les vendeurs -un couple- ont commencé. « On ne s’est jamais disputé sur le prix car celui que demandaient les vendeurs correspondait à l’évaluation », explique Kristel Miville. Le processus de négociation n’en a pas été moins mouvementé : balance de vente, durée du règne conjoint ont été autant de points de discussion. « Ça demande beaucoup de patience », reconnaît-elle.
Gérer les émotions
Et pour cause : les émotions font partie intégrante du processus et souvent, « elles sont toute mêlées », reconnaît Kristel Miville. Au-delà de la transaction, la vente pour l’un et l’achat pour l’autre partie représentent une prise de risque, qui suscite du stress, de la peur. « Le processus a été long et ardu. On a repoussé plusieurs fois certaines étapes.
Kristel Miville était consciente de tout ça et elle a fait preuve de patience. « Quand je sentais que ça n’allait pas bien, j’attendais, je laissais du temps, je faisais une concession sur un point, quitte à ce qu’on me reproche de ne pas être assez dure dans mon entourage. »
Trouver le financement
En parallèle des négociations, les acquéreurs ont dû financer leur achat et les investissements qu’ils projetaient déjà pour leur nouvelle entreprise. En plus d’apporter leurs capitaux propres, ils ont sollicité des prêts auprès des institutions bancaires. « Ce n’est pas facile quand on est un particulier : il faut convaincre les banquiers de nos capacités d’entrepreneur alors qu’on avait été que salariés dans notre carrière », note Kristel Miville. Ce qui l’a aidé, c’est son profil de comptable et celui opérationnel de son associé ainsi que… leur détermination.
Conserver le cédant dans l’entreprise
Accepter que l’ancien propriétaire conserve un poste dans l’entreprise est non seulement exigé, la plupart du temps, par les investisseurs et le processus de balance de vente mais c’est aussi souvent un atout. S’il ne dirige plus Multiforme Métal, le cédant occupe aujourd’hui le poste de directeur des opérations. « Il devait rester seulement un an avec nous mais on aimerait le garder plus longtemps. Il joue le rôle de conseiller. Les relations sont bonnes. Il respecte notre vision », souligne la présidente.
Mettre en œuvre rapidement son plan de développement
Dès leur arrivée à la tête de l’entreprise, Kristel Miville et Jonathan Gobeil ont créé un nouveau département de service pour pouvoir assurer l’entretien et la réparation des équipements achetés par leurs clients. « Le chiffre d’affaires du département a augmenté de 300 % en quelques mois », se réjouit la dirigeante.
L’équipe savait déjà qu’un des enjeux de l’industrie était de s’adapter aux changements et aux nouvelles technologies. « Les villes changent leur système de collecte pour pouvoir récupérer le compost et les produits recyclables. Or, les chutes à déchets ont été conçues juste pour les déchets ménagers, observe Kristel Miville. On est donc en train de concevoir une chute intelligente qui permette de récupérer tous les types de déchets et de les trier. Grâce à un écran tactile, les habitants pourront choisir le type de déchet et la bonne porte s’ouvrira. » C’est dans cette perspective que les financements avaient été demandés en amont. Multiforme Métal prévoit également vendre ses nouvelles chutes et les compacteurs à l’extérieur du Québec à moyen terme.
Le succès de la reprise de Multiforme Métal réside dans le respect d’un processus d’acquisition maîtrisé et minutieux, réalisé sans précipitation et dans le respect des émotions des uns et des autres mais aussi d’une planification. La mise en œuvre des plans de développement établis par l’équipe de relève a permis d’obtenir des résultats rapides.
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Multiforme Métal est soutenue par PME MTL Est-de-l'Île