La Transformerie donne une deuxième vie aux aliments

Défi d’entrepreneur | 12 mai 2021

Ce qui était au départ un défi entre deux amis est devenu un organisme qui combat le gaspillage alimentaire, mais dont la mission sociale vise bien plus que cela.

Durant l’été 2016, quelques mois après avoir quitté son poste de chef au restaurant montréalais Les 400 coups, Guillaume Cantin a été mis au défi par un ami de préparer un repas gastronomique composé à 100 %... d’ingrédients récupérés de conteneurs d’épiceries. Ayant accepté de jouer le jeu, il a alors constaté que ces bennes renfermaient bon nombre d’aliments sains. « Je savais qu’on y trouvait des quantités élevées de nourriture, dit-il. Toutefois, j’ai été stupéfait par leur qualité. En tant que chef, je ne pouvais pas y rester indifférent. »

La découverte a stimulé sa réflexion sur le système alimentaire actuel et les importantes pertes qui en découlent. À peine une année plus tard, l’exercice menait à la création de La Transformerie. Cet organisme réduit le gaspillage alimentaire en proposant des solutions au problème des invendus d’épiceries et de fruiteries, en plus de sensibiliser les commerçants et le grand public à cet enjeu.

Nous gérons chaque semaine environ une tonne d’aliments représentant d’une à deux journées d’invendus.

Près d’une tonne de nourriture chaque semaine

Dès le départ, Guillaume Cantin a constaté que le gaspillage ne relevait pas d’un manque de volonté, mais de moyens. De fait, quand il a commencé à rencontrer des gérants de supermarchés, ils se montraient eux aussi préoccupés et sensibles à cette situation. « Personne n’aime jeter de la nourriture, rappelle-t-il. Toutefois, nous avons compris qu’il y avait un besoin pour élaborer une solution s’arrimant à leur réalité. » Seul Moisson Montréal avait établi avec des grandes surfaces des opérations structurées. « Nous ne voulions pas remplacer cet organisme ou les autres groupes d’aide alimentaire, mais bien ajouter une ressource pour enrayer un problème majeur. »

Des ententes ont donc été conclues avec huit commerces pour la collecte. Grâce à une quinzaine de bénévoles, La Transformerie gère ainsi chaque semaine environ une tonne d’aliments et de produits, ce qui représente d’une à deux journées d’invendus.

De fait, dans notre arrondissement de Rosemont-La-Petite-Patrie, nous estimons qu’il y aurait environ 25 tonnes d’invendus générées chaque semaine. Toutefois, pour l’instant, nous ne serions pas en mesure de résorber un tel volume.  

L’entrepreneur et sa petite équipe de six personnes ont ciblé tous les produits alimentaires des épiceries : les fruits et les légumes, la viande, les produits de boulangerie, etc. « Nous les collectons le dimanche, jour où l’on compte le plus d’invendus, puis nous transformons, calibrons, préparons, emballons et livrons. » Résultat : 72 % de ce qui est récolté est redonné à divers organismes dans les 24 heures suivantes. Globalement, dans le travail de valorisation des invendus, seulement 7,3 % est envoyé dans les bacs bruns pour la collecte des matières organiques.

Financer, éduquer, convaincre

La Transformerie a aussi mis en place en mai 2019 Les Rescapés, sa propre gamme de tartinades, produites avec comme ingrédients principaux les fruits rescapés. Elle crée ainsi des saveurs telles que mangues et épices créoles, tarte aux pommes, petits fruits et cannelle, poire et gingembre, agrumes, fraise et basilic. Entièrement conçues à la main dans son quartier, elles sont véganes, réduites en sucre et offertes dans des pots consignés.

Les Rescapés n’ont pas qu’une mission de financement pour nous, explique Guillaume Cantin. Elles sensibilisent les consommateurs et leur démontrent qu’il est possible de concevoir d’excellents produits à partir d’aliments qu’on pensait au bout de leur vie utile. « En somme, elles sont l’antithèse du gaspillage. Elles jouent un rôle à la fois économique et gustatif. De plus, elles permettent d’amorcer la conversation avec des marchands. Grâce à elles, nous pouvons donner une réponse aux commerçants quant à la pertinence de récupérer leurs aliments invendus. Nous leur démontrons que ce qu’ils jettent peut leur revenir sous une nouvelle forme et que cette réincarnation est souvent même meilleure que ce qu’ils offrent sur leurs tablettes. »

Récupérer des aliments pour en faire des produits comestibles, c’est un simple pansement placé sur un enjeu beaucoup plus vaste.

La vente de ces tartinades dans plus de 70 points de vente représente la moitié des revenus de La Transformerie. Guillaume Cantin estime que si leur popularité continue de croître au rythme actuel, elles permettront à son groupe de s’autofinancer dès 2022. Depuis leur arrivée, plus de 25 000 pots ont été vendus.

Un écosystème à implanter

Tout en poursuivant sa mission première, La Transformerie souhaite bâtir un système alimentaire davantage résilient en mobilisant à la fois les citoyens, les commerçants, l’arrondissement et les autres organismes de dépannage alimentaire. « Récupérer des aliments pour en faire des produits comestibles délicieux, c’est bien, mais c’est un simple pansement placé sur un enjeu beaucoup plus vaste, croit Guillaume Cantin. Nous souhaitons travailler à réduire à la source avec la création d’un laboratoire sur la réduction du gaspillage alimentaire. Celle-ci représente une stratégie clé dans la lutte contre les changements climatiques, le gaspillage d’aliments étant responsable de 8 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre. »

Comment PME MTL a fait la différence pour La Transformerie

« J’adore m’associer à des gens qui me remettent en question, qui me forcent à pousser ma réflexion. Or, sur ce plan, PME MTL me permet d’aller plus loin, de me poser les bonnes questions et surtout de cogner aux bonnes portes. Je ne suis pas du tout intéressé à adopter le modèle de l’entrepreneur superhéros qui fait tout en solo. En ce sens, l’accompagnement de PME MTL dans une foule de domaine d’affaires me fait aussi progresser. PME MTL a permis d’accélérer le démarrage de La Transformerie par sa présence constante à des moments clés de cette étape. »

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La Transformerie est soutenue par PME MTL Centre-Est.

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